1982 : protéger Lech

En 1982, à l’invitation de la CFDT, une délégation de Solidarnosc arrive en France, elle est logée rue du Faubourg Montmartre à l’hôtel « Alexandra » situé à 100 m du 5 rue Cadet.

C’est évidemment un événement d’envergure nationale, et même internationale ; c’est la première fois qu’ils viennent en France, ils sont attendus par la presse, par certains politiques et certains syndicats sans compter les centaines de milliers de personnes qui arborent le badge « Solidarnosc » depuis plus d’un an.

La délégation, de huit membres, je crois, avec Lech Walesa et Geremek en tête, doit parcourir à pieds les 100 m qui les séparent de la confédé et j’ai été chargé avec deux autres permanents grands et costaux de faire le service d’ordre de Walesa.

La tâche ne sera pas de tout repos, car plusieurs dizaines de photographes attendent déjà Solidarnosk et notamment Walesa devant l’hôtel.

Ils sortent de l’hôtel et c’est déjà la cohue surtout autour de Walesa l’électricien et Geremek l’intellectuel ; nous réussissons à faire un petit cercle autour de Walesa, heureusement aidés par d’autres permanents et membres de Solidarnosc. Pour moi, c’est une première et je n’ai pas mon CAP « sécurité-service d’ordre » mais je suis condamné à bien assurer cette responsabilité sous peine de me faire chambrer par les autres permanents CFDT !

Le cortège avance lentement, mais nous avons eu la consigne de ne pas traîner, il faut jouer des coudes et élever la voix auprès de certains malades de photographes qui, pour prendre « la » bonne photo, n’hésitent pas à vous donner des coups.

Nous avons fait la moitié du court trajet lorsque Raymond, le copain serveur du bistrot du coin, traverse la rue avec cinq ou  six baguettes de pain qu’il vient d’acheter, il « tombe » sur notre « cercle-Walesa » et une idée-réflexe lui vient : il offre une baguette à Walesa….. Malheureux Raymond !

Il n’en fallait pas plus pour que les photographes se déchaînent de plus belle, il y a eu deux bonnes minutes de pures folies : Walesa et sa baguette de pain ! (ça m’a valu quelques coups de plus de la part des photographes)

Nous arrivons enfin à la confédé ; Edmond, Chérèque et les huit autres de la commission exécutive sont là pour accueillir la délégation de Solidarnosc.

Nous sommes épuisés et ce 100 m parcouru en dix ou quinze minutes minimum ne m’a pas donné envie de changer de boulot pour faire « service d’ordre ».